Rendez-vous de carrière : une évaluation inégalitaire et arbitraire

Depuis sa mise en place en 2017, les enseignant·e·s du premier et du second degré subissent leurs « rendez-vous de carrière ». Subissent, car le PPCR relève d’un management agressif où l’évaluation est à la fois inégalitaire et arbitraire. Les dérives de ce protocole, que SUD éducation et Solidaires avaient dénoncé dès le départ en ne le signant pas, sont régulièrement confirmées par les retours de nos collègues.

Cette année, encore, de nombreux d’entre elles et eux se sont senti·e·s dévalorisé·e·s. Trop souvent, la visite de l’inspecteur·rice demeure une épreuve vécue comme particulièrement anxiogène et déconnectée du quotidien des personnels. Trop souvent, les avis rendus par le Recteur ou la Rectrice, suite aux rendez-vous de carrière, sont en décalage avec la réalité de la pratique professionnelle des collègues. Trop souvent, la logique des quotas écarte la majorité des professeur·ses d’une possibilité d’avancement rapide alors même que leurs appréciations devraient le leur permettre. Tout ce protocole est particulièrement injuste et inadapté.

De fait, les quotas et les critères d’évaluation sont fixés à l’avance par l’administration. À évaluation égale, c’est l’opacité totale entre celles et ceux qui auront la chance de faire partie des 30 % de « méritant·e·s » et les autres. En effet, ce n’est pas le nombre d’items excellents qui compte, c’est le “mérite”. Or celui-ci se situe au-delà de l’enseignement stricto sensu : être formateur·ice, faire de l’animation de bassin, référent·e ou d’autres tâches que d’enseigner.

SUD éducation dénonce la mise en concurrence accrue des personnels qui sont ainsi poussés à réaliser des tâches annexes, chronophages et lourdes, sans décharge de service, ni indemnités, afin de progresser plus rapidement. On nous promettait une amélioration des revenus, on nous offre du bénévolat. Ce management profondément inégalitaire pénalise tout particulièrement les femmes. Celles-ci, du fait d’une répartition genrée des tâches, ont moins de temps pour prendre des charges supplémentaires dans les établissements puisque, d’après les dernières enquêtes, ce sont elles qui assument la majeure partie des tâches domestiques. Et que dire des personnes dont la situation de handicap empêche de toute évidence de participer à ces tâches désormais valorisées ? Nous dénonçons par conséquent un système d’évaluation qui, par certain aspects, se révèle sexiste et validiste.

Nous n’étions pas pour le système d’évaluation de carrière précédent, nous pouvons encore moins cautionner l’actuel qui est plus opaque et injuste. Le pouvoir accru de la hiérarchie – inspecteur·rices, chef·fes d’établissement… – de décider de qui a une promotion ou pas renforce les logiques clientélistes. Doit-on s’en étonner quand les exemples nous sont donnés au sommet même de l’État ? Après tout, on peut devenir ministre de l’Éducation nationale sans ne rien connaître à l’École, notamment publique… qu’est-ce qui justifie une telle promotion, si ce n’est l’arbitraire ? Nous ne pouvons croire que ce sont les compétences nécessaires…

Cette concurrence entre personnels et cette inégalité de traitement sont aggravées par le « Pacte » mis en place depuis la rentrée 2024. Ce dernier ne peut être considéré comme une augmentation de salaire puisqu’il augmente de fait le temps de travail. De plus, les « pacté·e·s » seront-iels considéré·e·s comme des méritant·e·s exemplaires pour leur avancement de carrière alors même que le « Pacte » dégrade à la fois les conditions de travail et la qualité des enseignements ?

SUD éducation revendique une formation continue de qualité allant de pair avec l’avancée de carrière. Cette formation doit se faire sur le temps devant élèves et en présentiel grâce au recrutement de personnels remplaçants dédiés au remplacement des enseignant·es en formation. Elle doit être choisie par les personnels, ouverte aux pédagogies coopératives et inclusives, intégrer les enseignements de lutte contre les discriminations et les derniers apports de la recherche universitaire.
SUD éducation revendique également l’abrogation du PPCR et la suppression de la classe exceptionnelle avec, pour fin de carrière et pour toutes et tous, l’indice du dernier échelon de l’actuelle hors classe.
SUD éducation revendique enfin l’abandon des « rendez-vous de carrière » et des « inspections » qui sont complètement décalés de la réalité des enseignant·es. L’évaluation de ces dernier·es doit être coopérative, purement formative, entre pairs, et déconnectée de l’évolution des rémunérations.

 

Rendez-vous de carrière : une évaluation inégalitaire et arbitraire