Pour une évolution de la position de Solidaires sur le travail du sexe

Texte adopté au consensus au congrès départemental des 30 et 31 mai 2024

Ce texte suivra le plus possible la règle d’accord de la majorité. Ainsi, l’expression « travailleur·se du sexe » sera accordée au féminin (même s’il ne faut pas oublier que des hommes et des personnes non-binaires sont concerné·es) et le terme « client » au masculin.

Définitions préalables

Travail du sexe

L’acronyme TDS (« travail du sexe ») est un mot-parapluie qui désigne différentes catégories d’activités qui impliquent une sexualisation du corps de la personne qui les exerce : massage érotique, accompagnement sexuel, prostitution, strip-tease, vidéo pornographique, webcaming, etc. Les personnes exerçant ces activités sont appelées « travailleuses du sexe ».

Le terme « prostitué·e » est considéré comme stigmatisant par la communauté des travailleur·ses du sexe, sauf s’il est employé par une personne concernée. Ce texte utilisera donc l’expression « travailleuse du sexe » pour désigner plus précisément des personnes majeures exerçant la prostitution. La prostitution est le fait de se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu’ils soient, afin de satisfaire les envies sexuelles d’autrui.

Modèles de cadres légaux

Constat

La loi « visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées », dite loi de 2016 sur la prostitution, affirme la position abolitionniste de la France, abroge le délit de racolage et instaure une contravention pour l’achat de services sexuels (amende de 1500 euros, 3750 euros en cas de récidive). À cette amende s’ajoute une peine de stage de sensibilisation à la lutte contre l’achat d’actes sexuels. La loi prévoit un parcours de sortie de la prostitution avec la délivrance d’une autorisation provisoire de séjour de six mois renouvelable, le versement d’une aide financière (330€ mensuel pour une personne seule) à l’insertion sociale et professionnelle pour les personnes non éligibles aux minima sociaux et le soutien d’une association agréée pour l’accès à un logement social, à une formation, aux soins et aux droits.

Analyse

Les travailleuses du sexe et les associations travaillant auprès d’elles dénoncent des conséquences néfastes de la loi de 2016.

En particulier, la pénalisation des clients et les arrêtés municipaux répressifs (interdiction de stationnement et/ou d’activité dans un secteur géographique) poussent les travailleuses du sexe à l’isolement et à la clandestinité et augmentent les risques auxquels elles sont confrontées : refus de porter un préservatif, demande de « prestations » risquées ou violentes, rendez-vous dans des zones géographiques éloignées des lieux de passage et d’habitation, violences physiques et/ou sexuelles, etc. Tout cela met ainsi gravement en danger leur sécurité.

En ce qui concerne le parcours de sortie, les conditions d’accès et les modalités pratiques proposées (difficile accès à un hébergement, obstacles à la régularisation du séjour, allocation financière insuffisante pour vivre, arrêt immédiat et total du travail du sexe) ne permettent pas aux personnes de s’inscrire dans ce parcours et donc de protéger celles qui en ont besoin, contrairement à ce que prônait la loi.

Par ailleurs, la définition du proxénétisme est large en France : il s’agit de « tirer profit de la prostitution d’autrui ou de la favoriser » mais aussi d’ « aider, assister ou protéger la prostitution d’une personne, même sans en tirer profit », de « servir d’intermédiaire entre une prostituée et son client » ou encore de « vivre avec une prostituée sans pouvoir justifier des ressources de son train de vie ». Ces formulations sont soumises à interprétation et sont susceptibles de porter préjudice aux travailleuses du sexe en les empêchant de bénéficier d’aides et de soutiens matériels et psychologiques de la part de leurs proches. Cela peut engendrer des difficultés dans l’accès à un logement digne, voire au logement ; la vie commune avec un·e conjoint·e et/ou des enfants majeur·es ; les relations sociales avec des ami·es ou des proches ; l’entraide, l’association et la syndicalisation, etc.

Perspectives

SUD éducation Gard-Lozère s’oppose à :

– l’exploitation sexuelle d’autrui, dans une perspective féministe et anticapitaliste ;

– la traite et le trafic d’êtres humains, notamment à des fins d’exploitation sexuelle, ainsi qu’à la prostitution forcée et à la prostitution des mineur·es ;

– le prohibitionnisme et toute forme de criminalisation ou de pénalisation pour tous les travailleurs et toutes les travailleuses du sexe.

SUD éducation Gard-Lozère revendique :

– un plan d’urgence avec des moyens humains et matériels à la hauteur des besoins pour les personnes voulant sortir de la prostitution afin de leur assurer une alternative pérenne, des lieux d’accueil et de soutien, des aides à la reconversion ;

– la régularisation des personnes sans-papiers travailleurs et travailleuses du sexe et/ou soumises à l’exploitation sexuelle et au trafic d’êtres humains sans condition (au même titre que les autres sans-papiers) ;

– redéfinir la notion de proxénétisme en s’appuyant sur la loi de la traite des êtres humains afin de ne pénaliser en aucune manière les travailleurs et les travailleuses du sexe

– des moyens humains et matériels pour l’application des dispositions sur la traite des êtres humains afin de lutter contre l’exploitation sexuelle ; la confiscation des biens provenant de l’exploitation sexuelle pour indemniser les victimes ; la lutte contre le blanchiment d’argent de l’exploitation sexuelle possible par les paradis fiscaux et judiciaires et les circuits financiers ;

– des moyens humains et matériels pour une éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle dès la maternelle qui enseigne l’égalité femmes-hommes et le respect du consentement d’autrui ;

– l’accès pour tous et toutes aux droits universels : soins, prestations sociales, logement, formations.

SUD éducation Gard-Lozère demandera à Solidaires de faire évoluer sa position sur le travail du sexe. SUD éducation Gard-Lozère soutient que les lois actuelles sur le proxénétisme et la pénalisation des clients doivent être modifiées : elles ne doivent plus contenir de dispositions répressives qui mettent en danger les travailleurs et les travailleuses du sexe. Il s’agira donc de dépénaliser les clients, permettre l’existence d’un parcours de sortie viable et limiter la définition du proxénétisme à la traite et au trafic d’êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle.